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HPI et monde professionnel, vers une reconnaissance de l’intelligence ?
LE FOCUS DU MOIS D'AVRIL 2024

L’enjeu des organisations d’aujourd’hui est d’attirer, repérer, fidéliser, les collaborateurs ayant les plus grandes capacités de communication, de coopération, d’adaptabilité́, de leadership, de flexibilité́... Mais, dans cette longue liste de « soft skills », quelle place pour l’intelligence, ou les intelligences ?

Très peu évoquée de manière explicite dans les politiques de valorisation des « ressources humaines », cette dimension deviendrait-elle un impensé, alors même qu’elle est au moins aussi porteuse de progrès pour une organisation que d’autres qualités de la sphère des « soft skills » ?

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1) L’intelligence, c’est la capacité à sélectionner et à faire des liens entre des informations...

Plus que jamais, dans un monde complexe et changeant, discerner les éléments saillants, les mettre en relation, faire des parallèles et des liens entre différents domaines, proposer une vision globale et non limitée - sans jamais s’y « noyer » - devrait être une compétence essentielle et amplement valorisée... Or cette qualité́, au sens strict du terme, c’est l’intelligence !

Plus encore, la capacité à faire des liens entre les informations pertinentes constitue un atout évident dans des organisations qui ont besoin de favoriser la transversalité́ : l’intelligence est un des meilleurs garants de la capacité à comprendre les besoins et les savoir-faire de différentes entités, à mener des projets transverses, à trouver des synergies entre des compétences distinctes.

Vue sous cet angle, l’intelligence devrait être une des vertus cardinales recherchées et détectées par les organisations actuelles. Mais voilà, depuis qu’elle a été́ mise en chiffres, sans doute maladroitement et imparfaitement, sous le nom de QI (Quotient Intellectuel), l’intelligence a mauvaise presse... C’est peut-être là que débute le grand malentendu.

2) Les « tests de QI » reconnaissent bel et bien plusieurs intelligences

Les psychologues qui font très régulièrement passer des « bilans de QI » vous le diront : au terme de ces passations, ils font le point sur la manière qu’a eue la personne de se confronter aux différents exercices, sur les chemins qu’elle a employés, et ils calculent des indicateurs chiffrés, recouvrant différents aspects du fonctionnement intellectuel (différents domaines dans lesquels on « fait des liens » plus ou moins facilement) : domaine verbal, mémoire, logique, repérage dans le plan et l’espace, raisonnement numérique, compréhension des attendus sociaux, rapidité́ visuo- motrice...

En revanche, contrairement à ce qu’on pourrait croire, le seul chiffre qu’ils ne calculent et considèrent que rarement, c’est paradoxalement le QI ! Le QI (qui n’est d’ailleurs calculable que dans une minorité́ de cas « homogènes ») n’a au mieux de sens que comme ordre de grandeur. Mais, en les agrégeant et les simplifiant, il écrase les intelligences, c’est-à-dire le détail de la richesse des composantes de l’intelligence, telle qu’elle émerge d’un « bilan de QI », richesse qui fait que deux fonctionnements intellectuels ne sont jamais réellement identiques.

La théorie des intelligences multiples de Gardner s’est d’ailleurs quant à elle constituée en opposition apparente au QI, alors qu’elle n’en est pas si éloignée ! La seule limite (mais non des moindres) de la théorie de Gardner est qu’elle n’a pour l’instant pas encore débouché́ sur un test scientifiquement validé, contrairement aux échelles de Wechsler, précisément utilisées dans les « bilans de QI ».

3) L’intelligence générale est gage de potentiel d’adaptation...

S’il existe plusieurs formes d’intelligence, ces intelligences ne sont pas complètement indépendantes : en effet, plus une personne obtient des résultats élevés sur telle dimension de l’intelligence, plus les probabilités d’obtenir également des résultats élevés sur un certain nombre d’autres dimensions de l’intelligence sont élevées...

Cette conception théorique (validée par les observations) nous ramène à ce que l’on appelle les modèles de l’intelligence hiérarchiques, qui tendent à faire consensus dans la communauté́ scientifique aujourd’hui : l’idée de ces modèles est qu’il existe une « intelligence générale », que l’on ne parvient pas aujourd’hui à mesurer de manière précise et univoque, mais qui est « cachée » (à des degrés divers) derrière chaque intelligence spécifique : le « facteur g ».

Ce fameux « facteur g », est ce qui se rapprocherait le plus de notre capacité d’apprentissage générale, et donc en particulier de notre potentiel d’adaptation rapide à des situations nouvelles... à de nouveaux métiers, de nouveaux contextes, de nouvelles équipes... soit une capacité fondamentale du point de vue d’organisations évoluant dans des environnements changeants ! La force de l’intelligence !

4) Adaptation : soumission, ou agent de disruption ?

Encore convient-il de s’entendre sur ce qu’on nomme la capacité d’adaptation : de fait, il ne s’agit pas ici d’intégration - sans prise de recul - des manières de faire, modes de fonctionnement, et de résolution des problèmes, des collectifs qu’on intègre. Bien au contraire...

En effet, de nombreuses études scientifiques sur les traits de personnalité́ des personnes avec un Haut Potentiel Intellectuel (HPI) montrent chez ces personnes une plus grande ouverture à l’innovation, et aux idées nouvelles, mais aussi une plus grande curiosité́, ainsi qu’une plus grande autonomie, que celles retrouvées en population « classique ».

La capacité d’adaptation dont on parle ici porte donc bel et bien en elle les germes de la disruption, de la différence, de la pensée divergente. Elle n’est ni lisse, ni conforme, et peut-être parfois même porteuse d’inconfort. Mais, dans son équilibre instable, une organisation n’a-t-elle pas autant besoin de voix qui « l’emmènent ailleurs », que de voix qui font consensus ? À elle de savoir les écouter et les actualiser... !

5) L’intelligence ne se voit pas si facilement

Si le haut potentiel intellectuel, et plus largement l’appréhension et la compréhension des différentes intelligences d’une personne, sont potentiellement porteur d’impacts positifs pour les organisations, d’où vient l’impensé qui les entoure ? C’est là qu’intervient un deuxième malentendu :

  • Contrairement à ce qu’on entend encore parfois, le diplôme obtenu ne dit pas tout (voire dit peu...) du potentiel intellectuel d’une personne. Il constitue certes une forme d’assurance minimale, mais qui revient à l’inverse à se couper d’autres talents et personnalités. Demandez-vous par exemple combien de personnes à haut potentiel intellectuel font partie des employés à faible niveau de qualification de votre entreprise...

  • Et surtout, contrairement à ce que l’on croit, le haut potentiel intellectuel n’est pas si facilement visible dans la vie quotidienne, ni même en situation de travail. Il ne l’est pas facilement, en tout cas, pour un manager qui encadrerait « normalement » un collaborateur parmi d’autres, sur des activités et tâches à peu près conformes à ce qu’on peut habituellement trouver en entreprise. Pour apercevoir réellement ce potentiel intellectuel, il faut pouvoir soumettre une personne, dans un temps limité, à une résolution de tâches successives complexes et variées, et l’observer (de manière objective) dans les processus qu’elle met en œuvre... C’est précisément ce que l’on fait dans les « bilans de QI ».

Est-ce à dire, si l’intelligence se voit si mal, qu’il faudrait « tester » tous les collaborateurs ? La réponse est bien évidemment négative... En revanche un usage ponctuel de ces outils, déontologiquement encadré, axé sur la valorisation des parcours, sur l’émergence de « talents » différents, identifiés dans des fonctions autres que celles du top management (dont ils sont parfois même extrêmement éloignés !), pourrait être envisagé, afin de sortir les organisations de cet « impensé » qui les voue un peu trop souvent à la reproduction de l’existant.


Des évolutions sur le financement du bilan de compétences…
LA BRÈVE DU MOIS 

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Le gouvernement vient de soumettre aux partenaires sociaux son projet de décret mettant en place un « reste à charge » (pour le stagiaire) dans la prise en charge des formations et bilans de compétences par le CPF (Compte Personnel de Formation) : à la clé (en toute probabilité), à partir du 1er mai 2024, une franchise de 100€ qui sera à payer par les bénéficiaires de bilan de compétences financés CPF - sauf dans certains cas précis (demandeur d’emploi, abondement de l’employeur…).
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